Parents, enseignants, dialoguez !

Inattention, démotivation, mauvaise mémorisation, manque de réflexion…votre enfant a du mal à suivre à l’école. Et il perd progressivement confiance en lui-même. « A la maternelle, les problèmes de langage donnent l’alerte. Mais ensuite, ce sont toujours les bulletins de notes scolaires qui révèlent une difficulté et suscitent l’inquiétude des parents et des enseignants. » fait remarquer Isabelle Causse-Mergui, orthophoniste.

Viennent ensuite pour les parents l’heure des interrogations et des remises en questions. « En général, quand ils me consultent, ils se sentent coupables et pensent bien souvent que tout est de leur faute » explique la spécialiste. « Or, il n’y a pas une cause unique pour expliquer l’échec scolaire d’un élève. Celui-ci est dû à une conjonction de causes : schématiquement, l’enfant présente une constitution personnelle moins résistante dans un domaine particulier; il peut avoir rencontré des difficultés (divorce, déménagements, deuil…) et des maladies (surdité même passagère, hospitalisations…) qui sont entremêlées avec celles des parents et ont souvent été aggravées par un enseignant insuffisamment formé, désarçonné par un enfant différent » note Isabelle Causse-Mergui. Donc histoire de l’enfant, de ses parents et de l’école avec ses méthodes pédagogiques variées, voilà les facteurs à tenir en compte si l’on veut trouver les bons remèdes.

Par contre les attitudes des parents divergent face aux enseignants, qui se partagent souvent en deux types: ceux-ci considèrent les parents comme partie prenante de l’éducation, avec qui il est absolument nécessaire d’avoir de bonnes relations et qu’il faut intégrer dans la remédiation; ou bien ils estiment que les parents n’ont pas leur place à l’école et n’ont pas d’avis à donner sur les bonnes méthodes. Résultat? Le dialogue parent - enseignant peut être totalement différent selon les cas. Soit le parent est très soumis à l’opinion du maître, adopte le même discours et accepte par exemple un redoublement, même si le bon sens en démontre l’inutilité. Soit les deux partis s’opposent, chacun rejetant la faute sur l’autre, évitant ainsi de se remettre en cause. 

Il est pourtant fondamental de trouver des solutions pour que l’enfant puisse retrouver le plaisir d’apprendre et de raisonner. Car tous les enfants veulent réussir et souffrent de cette situation. Et d’autant plus si les adultes, angoissés eux-mêmes par la situation, s’irritent contre eux. C’est pourquoi il faut absolument éviter les paroles humiliantes à leur égard (de plus,cette méthode ne marche pas!), aussi bien en tant que parent qu’en tant qu’enseignant. Au premier d’aller voir le second en lui demandant conseil. Cela aboutit souvent à ce que chacun connaisse mieux les différentes facettes de l’enfant et change de regard sur lui….

De nombreuses possibilités existent actuellement pour aider enfants et adolescents à franchir les obstacles les empêchant de s’épanouir à l’école: médecins, spécialistes (psychologues scolaires, psychopédagogues…) et orthophonistes extérieurs sont à l’écoute du jeune pour trouver des moyens adaptés»

Généralement les enseignants conseillent aux parents de consulter un médecin traitant pour décider avec lui d’un bilan orthophonique. Après un certain nombre de tests de capacités et de connaissances, le bilan indique si l’enfant a des troubles particuliers ou des lacunes et s’il peut profiter d’une aide. « Pour un tiers des bilans d’enfants sans souffrance organique, il me suffit de rassurer la famille sur l’intelligence de leur enfant et de donner des conseils, sans proposer de suivi thérapeutique de l’enfant. Inutile par exemple, de s’acharner sur ses devoirs du soir, de le faire travailler sans arrêt même le dimanche, de le priver d’activités extra-scolaires. Il y a aussi d’autres choses dans la vie quotidienne qui permettent aux parents de stimuler la curiosité et la réflexion de leur enfant, comme la cuisine, les jeux de stratégie…indique l’orthophoniste. Les deux autres tiers de mes bilans « ordinaires » aboutissent à une proposition de rééducation. Je crois à une construction progressive, un travail réfléchi, une structuration patiente, qui ne reproduit pas ce qui est réalisé ailleurs… ». Ce qui ne signifie pas qu’une prise en charge orthophonique dure nécessairement des années. En dehors des cas graves, il n’y a aucune raison pour qu’un enfant d’intelligence normale (comme c’est le cas de la majorité des consultants dans nos cabinets en France) restent des années en rééducation sans progrès scolaire notable. »

Pour notre spécialiste, «un trouble intellectuel n’est jamais simplement une privation ou un excès. Il se trouve toujours une réaction de la part de la personnalité entière pour restaurer, remplacer, compenser, rééquilibrer. Pour aider l’intelligence à se développer, il faut faire appel à la totalité de la personne, à ses capacités relationnelles. Il faut s’appuyer sur la partie saine de l’individu, celle qui fonctionne bien, celle qui n’a pas de mauvaises habitudes».

Il s’agit avant tout de valoriser des intelligences différentes pour redonner espoir à des enfants en difficulté et à leurs parents. 

Presse : article dans le journal vivre au féminin, 20 novembre 2005